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La luminothérapie

La luminothérapie, est reconnue comme le traitement de première intention dans la dépression saisonnière, mais a été aussi utilisé avec succès dans la dépression non saisonnière et d'autres pathologies psychiatriques et neurologiques, comme par exemple la boulimie et la maladie d'Alzheimer. De plus la privation aiguë de sommeil est le traitement antidépresseur au délai d'action le plus court. Ce livre écrit par des experts reconnus internationalement propose de combiner la luminothérapie et la privation de sommeil pour une prise en charge des troubles de l'humeur.

Après une revue brève mais précise des rythmes circadiens et des mécanismes d'action de la lumière, les applications en psychiatrie de la luminothérapie, de la privation de sommeil et des modifications des horaires de sommeil sont revues. Les nombreuses figures et exemples cliniques aident la compréhension et permettent au lecteur d'utiliser ce livre comme manuel accompagnant une prise en charge clinique.

Les auteurs réussissent à présenter une vision intégrative des traitements médicamenteux habituels et de la chronothérapie/luminothérapie en hospitalisation et en ambulatoire.

Les programmes de prises en charge proposés non seulement pour la dépression unipolaire et la dépression du trouble bipolaire, mais aussi la dépression chez la femme enceinte, le trouble dysphorique prémenstruel, la boulimie, le trouble avec déficit de l'attention - hyperactivité, la démences, la maladie de Parkinson, les troubles liés au travail posté et lié au décalage horaire. Ces nouvelles approches non médicamenteuses sont à envisager dans la majorité des cas comme des compléments des prises en charges traditionnelles, permettant une rémission plus rapide, une diminution des symptômes résiduels et une diminution des rechutes.

La combinaison luminothérapie/chronothérapie pourrait être un traitement de choix dans le cadre des dépressions résistantes.

Il est surprenant d'apprendre, en lisant les références bibliographiques citées dans ce livre, que l'efficacité de la luminothérapie et de la chronothérapie dans les troubles affectifs non saisonniers est connue depuis de nombreuses années alors que ce type de traitement n'est pas courant en pratique clinique. Espérons que ce manuel convaincra les soignants en psychiatrie de l'efficacité et de l'effi- cience de ce type de traitement afin que nos patients puissent en bénéficier.

Pour plus d'information sur les rythmes circadiens, la chronothérapie et la luminothérapie, les échelles d'évaluation et de mesure, on peut aussi visiter le site internet du CET (Center for Environmental Therapeutics) : www.chronotherapeutics.org.

Chronotherapeutics for Affective Disorders. A Clinician's Manual for Light and Wake Therapy.

Anna Wirz-Justice, Francesco Benedetti et Michael Terman. Publié par S. Karger AG, Basel, Switzerland, 2009. ISBN 978-3-8055-9120-1

Dr Tifenn RAFFRA

La luminothérapie efficace à la mi-journée dans le trouble bipolaire

L'exposition quotidienne à une lumière blanche brillante à midi a diminué de façon significative les symptômes de la dépression et amélioré le fonctionnement chez des personnes atteintes de trouble bipolaire, selon une récente étude de Dorothy Sit, professeur agrégé de psychiatrie et de sciences du comportement à l'École de médecine Feinberg de l'Université Northwestern. Ses travaux ont été publiés le 3 octobre dans l'American Journal of Psychiatry.

Des études antérieures ont montré que la luminothérapie matinale réduisait les symptômes chez des patients atteints de dépression saisonnière, faisant même aussi bien (voire mieux) que la fluoxétine (Prozac®) dans la dépression non saisonnière. En revanche, chez les patients bipolaires (sensibles aux rythmes circadiens), une exposition à la lumière dès le réveil est susceptible d’entrainer un épisode de manie ou des symptômes mixtes. C’est d’ailleurs ce qu’a observé l’équipe du Pr Sit, dans une précédente étude parue en 2008. C’est pourquoi, les chercheurs ont mis en œuvre un protocole de luminothérapie démarrant à partir de midi dans le but de soulager la dépression bipolaire tout en évitant ces effets secondaires.

Dose progressive de lumière entre 12h00 et 14h30

L'étude a inclus 46 participants (âge moyen : 44,7 ans; 67% de femmes) qui présentaient au moins un épisode dépressif modéré, un trouble bipolaire et qui prenaient un stabilisateur de l'humeur.

La plupart des patients ont été inclus pendant les mois d’automne et d’hiver. Les patients ont été assignés au hasard à recevoir une lumière blanche brillante de 7 000 lux (contre 10 000 lux classiquement dans la dépression saisonnière) ou une lumière ambiante placebo de seulement 50 lux ; les dispositifs dispensant de la lumière étaient identiques dans les deux groupes, de même que le nombre de patients sous antidépresseurs.

Les patients du groupe luminothérapie ont été invités à placer la lumière à environ 30 cm de leur visage avec des séances de 15 minutes entre midi et 14h30 pour commencer.

Chaque semaine, ils ont augmenté leur exposition à la luminothérapie par paliers de 15 minutes jusqu'à ce qu'ils atteignent une « dose » de 60 minutes par jour ou observent un changement significatif de leur humeur.

« En commençant à une dose faible et en augmentant progressivement la dose au fil du temps, nous avons pu ajuster pour la tolérance et faire en sorte que le traitement soit adapté à la plupart des patients », a déclaré le Dr Dorothy Sit, premier auteur de l’étude, dans un communiqué.

Un taux de rémission significativement plus élevé

Par rapport à une lumière placebo de faible intensité, les participants assignés à la lumière blanche brillante entre midi et 14h30, pendant six semaines, ont connu un taux de rémission significativement plus élevé (dépression minimale et retour au fonctionnement normal) entre les semaines 4 et 6 que le groupe placebo.

Plus de 68% des patients ayant reçu la lumière vive de midi ont atteint un niveau d'humeur normal, contre 22,2% des patients ayant reçu la lumière placebo (IC95%, 1,80 – 31,28; P = 0,003 et voir le graphique ci-dessous).

Sit et ses collègues ont observé un effet notable de luminothérapie à quatre semaines, ce qui est similaire à d'autres études qui testent la luminothérapie pour la dépression non saisonnière et la dépression pendant la grossesse

Le groupe bénéficiant d'une luminothérapie a également obtenu un score de dépression moyen (score SIGH-ADS) de 9,2, comparativement à 14,9 pour le groupe placebo, et score de fonctionnement (score GAF) significativement plus élevé, « ce qui signifie qu'ils pouvaient retourner au travail ou accomplir des tâches qu'ils n'avaient pas pu terminer avant de prendre ce traitement » précisent les chercheurs dans le communiqué.

Une réponse solide au bout de 4 à 6 semaines et des effets secondaires minimes

« Les traitements efficaces dans la dépression bipolaire sont très limités, surtout pour la phase dépressive », a déclaré le Pr Sit. « Cela nous donne une nouvelle option de traitement pour les patients bipolaires dont nous savons qu’ils obtiennent une réponse solide au bout de quatre à six semaines. » De plus, les patients rencontrés des effets secondaires minimes. Personne n'a connu d’épisodes de manie ou d'hypomanie.

 « En tant que cliniciens, nous nous devons de trouver des traitements qui évitent ces effets secondaires et permettant une réponse confortable et stable. Le traitement avec la lumière vive à la mi-journée peut en être un » a-t-elle ajouté.

Quelles modalités de traitement chez les patients bipolaires ?

« Autant le protocole d’utilisation de la luminothérapie (durée, période de la journée) est bien établi et ne pose pas de problème chez les personnes déprimées (sans troubles bipolaires), autant on ne connait pas les modalités d’escalade thérapeutique chez les patients atteints de troubles bipolaires, a commenté le Dr Pierre A. Geoffroy, psychiatre au sein du Centre Expert FondaMental troubles bipolaires de l'Hôpital Fernand Widal, pour Medscape édition française.

L’aspect le plus original de ce travail tient donc au fait que donner à la mi-journée la luminothérapie n’a entrainé aucun virage maniaque ». 

Si aujourd’hui, les raisons d’une telle différence de timing restent obscures, les années qui viennent devraient voir les bases du fonctionnement de la luminothérapie chez les patients bipolaires et les modalités du « traitement » (doses, horaires, durées) s’éclaircir.

A Chicago, Sit et ses collègues envisagent déjà de nouvelles études, tandis que de ce côté-ci de l’Atlantique, le Dr Geoffroy s’apprête à lancer, lui aussi, un essai sur la luminothérapie visant à définir ses modalités chez les patients atteints de troubles bipolaires.

Stéphanie Lavaud

19 octobre 2017

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